Hommage à Thomas Sankara : Des experts appellent à la reconquête de la souveraineté numérique de l’Afrique

Ouagadougou, 13 oct. 2025 (AIB)- À l’occasion de la 38ᵉ Journée d’hommage au père de la Révolution burkinabè, le président Thomas Sankara, des experts africains ont animé, mardi, un panel sur le thème : « Jeunesse, technologie et innovation pour la transformation de l’Afrique », invitant les États africains à s’émanciper de l’« impérialisme numérique ».

Selon la conférencière camerounaise Nathalie Yamb, les téléphones portables, Internet et les nouvelles technologies ne sont pas de simples outils de communication ou de divertissement, mais de véritables armes stratégiques utilisées dans les nouvelles formes de domination mondiale.

« Nous sommes dans un nouvel espace de guerre : l’espace numérique. Il nous faut des armées et des guerriers patriotiques dans ce domaine », a-t-elle insisté, invitant les gouvernements africains à prendre conscience des risques et à bâtir une cybersouveraineté africaine.

Mme Yamb recommande aux États africains de légiférer sur la protection des données, de taxer les plateformes numériques opérant sans représentation locale et d’imposer l’installation de centres de données (data centers) sur le continent.

Elle a également plaidé pour la création d’une Alliance digitale des États du Sahel et d’une Agence africaine de cybersécurité et de souveraineté numérique, afin de mutualiser les ressources et de défendre les intérêts stratégiques du continent.

« Tous les pays conscients de leur souveraineté exigent que les données de leurs citoyens soient hébergées sur leur sol. Pourquoi pas nous ? », a lancé Nathalie Yamb, citant les exemples de la Russie, de la Chine et de l’Inde.

Abordant le sous-thème « La jeunesse africaine comme force motrice des révolutions technologiques et sociales », le panéliste burkinabè Serge Imhotep Bayala a indiqué que la jeunesse, qui représente 70 % de la population africaine, constitue à elle seule une véritable technologie naturelle qu’il convient de valoriser et d’exploiter.

Pour lui, cette énergie démographique doit être canalisée vers la création technologique et non vers la simple consommation. Il a encouragé les jeunes à concevoir des innovations adaptées aux réalités africaines, en citant des exemples concrets d’applications dans les domaines de la santé, de l’agriculture et de la logistique.

Sur le plan social, les intervenants ont souligné que la maîtrise du numérique peut améliorer le quotidien des populations. Des applications locales permettent déjà de repérer les pharmacies de garde, de payer les factures sans déplacement ou encore de localiser les centres de santé les plus proches.

Le troisième panéliste, Djakarya Ouabo, a souligné l’importance de l’intelligence artificielle (IA) pour renforcer les capacités, notamment dans les domaines de l’éducation, de la recherche et de l’agriculture. Cependant, il a mis en garde contre les risques liés à son utilisation et a recommandé la création d’une IA locale capable d’héberger les données de l’administration afin de réduire les menaces de cybercriminalité.

Les participants ont enfin appelé à ancrer la technologie dans les réalités africaines, à l’image de la Chine ou des États-Unis, afin d’éviter une simple imitation culturelle.

Cette rencontre, organisée dans le cadre des activités commémoratives du 38ᵉ anniversaire de l’assassinat du président Thomas Sankara, a réuni de nombreux jeunes, chercheurs et acteurs du numérique venus de divers pays du continent africain.

Agence d’Information du Burkina (AIB)

YOS/ata

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