BURKINA-LOROUM-TELEPHONIE
Loroum : L’absence du réseau téléphonique plombe les actions de résilience
Ouahigouya, (AIB)-Le sabotage répété des installations téléphoniques a fini par isoler les localités du Loroum. A Titao, appeler, naviguer sur le net ou recevoir un appel téléphonique, est devenu un véritable parcours du combattant. C’est sur des élévations de la ville que les plus chanceux arrivent à capter des ondes perdues pour émettre des messages à certaines heures de la journée. Malgré des démarches de l’autorité provinciale auprès des opérateurs de téléphonie, rien ne semble bouger.
Il est 18 heures. Soumaila Ganamé, animateur radio s’active sur la colline P, un point élevé de la ville.
Il fait des va et viens pour mieux repérer le signal du réseau téléphonique. Soumaïla doit télécharger les dernières informations et émissions du jour.
A côté de lui, une dizaine de personnes font le pied de grue sur cette colline devenue emblématique en ces temps de crise sécuritaire.
Tête baissée pour avoir les messages de ses correspondants mais l’oreille attentive à la moindre alerte.
La colline P, c’est là que beaucoup de titaolais tentent de garder le contact avec les proches à l’extérieur.
« Nous sommes frontalement impactés par le manque de réseau aussi bien dans l’animation des émissions où nous étions obligés de nous réinventer que dans l’animation des sessions d’information. Pour les émissions interactives nous sommes obligés d’aller au contact physique des intervenants par le biais des micros-trottoirs », stipule M. Ganamé.
Il confie que « Chaque soir, c’est au sommet des collines que nous partons pour espérer avoir le peu d’informations à partager avec nos auditeurs. C’est là également que nous recevons les émissions à diffuser et les instructions de nos partenaires ».
Noufou Boina est acteur du développement communautaire. Membre d’une association encore active dans la localité, il accompagne la mise en œuvre de projets de développement sur le terrain.
Et pour se faire, M. Boina doit rester en contact avec les responsables de la structure basée à Ouahigouya. Tout comme Ganamé, Boïna est également un abonné de la colline.
« Le problème de réseau nous cause beaucoup de désagréments. Son absence occasionne des problèmes de coordination des activités. Les pertes de crédit de communication et les retraits de numéros d’abonnement sont fréquents », relève M. Boina qui dit courir des risques en s’aventurant régulièrement sur la colline.
Depuis que les réseaux téléphoniques ne fonctionnent pas bien, la prise en charge des patients a pris également un grand coup. Le problème est encore plus accru au niveau de la santé maternelle.
« Avant, on pouvait appeler un membre de la famille au cours de la nuit pour accompagner une femme en travail dans une formation sanitaire. Aujourd’hui, le fait qu’il n’y a pas de réseau, les femmes sont obligées d’accoucher à la maison sans assistance sanitaire », poursuit Boïna.
Le seul réseau qui n’a pas été interrompu est Telecel Faso. Mais il est tellement sollicité qu’il est saturé.
« Nous saluons cet opérateur pour les efforts consentis. C’est ce réseau qui maintient le minimum de communication à l’intérieur de la ville » note-t-il avant de pousser un long soupir.
A Titao, l’absence de réseau affecte l’ensemble des couches socio-économique. Les leaders communautaires se disent victimes de l’isolement.
Jean Sawadogo est leader religieux. Il doit toujours se référer à la hiérarchie pour des consignes. « L’absence du réseau nous rend la tâche difficile car nous n’arrivons pas à rentrer en contact avec la hiérarchie. Nous demandons aux autorités nationales de prendre au sérieux le problème ».
Comme Jean Sawadogo, Philippe Niampa, un autre leader religieux enfonce le clou « En tant que responsable religieux, on recevait de l’appui de nos amis qui sont à l’extérieur. Mais avec les problèmes de réseau les transactions sont difficiles et nous n’avons reçu aucun appui. Cela, a des conséquences néfastes sur nos fidèles qui bénéficiaient de cette aide » ;
Harouna Boina, un leader local s’inquiète, « La situation devient intenable. Il faut que chaque opérateur fasse un effort pour le rétablissement du réseau ».
Du côté des services de transaction de monnaie électronique, les conséquences sont plus visibles. Le travail est souvent à l’arrêt. Le problème du réseau a rendu morose les activités. Les chiffres d’affaires sont en baisse drastique. Pourtant le contexte l’impose. C’est un moyen important de résilience des populations.
Ils sont des milliers de personnes vulnérables à vivre des fonds humanitaires versés aux bénéficiaires en monnaie électronique. Le recours à la monnaie électronique est la seule voix des transactions financières, l’accès à la localité par la route étant impossible.
Face à ces cris de cœur, plusieurs démarches ont été entreprises par le Haut-Commissaire de la province du Loroum auprès des opérateurs de téléphonie mais elles sont restées vaines. L’autorité provinciale aurait même fait des propositions aux opérateurs de téléphonie en termes d’appui au déplacement des équipes techniques. En attendant les populations de Titao continuent de s’abonner aux collines à la recherche du précieux sésame.
Agence d’information du Burkina
ASO/hb/bz