Femmes et enfants installés à Sibi crient à l'aide.

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Balés : La très difficile gestion des déplacés de Sibi 

Ouagadougou 23 juillet 2020 (AIB)-Les autorités des Balés (Ouest) ne savent pas où donner la tête, devant le dénuement de près de 3000 personnes ayant fui les exactions terroristes, auxquels se sont joints des individus surtout intéressés par l’orpaillage et la forêt classée de Soroboly.

 «Les terroristes ont décidé de ne pas nous laisser vivre chez nous», soupire Seydou Yongo, en cette matinée du 18 juin 2020 au village de Sécaco (Ex Société d’exploitation des carburants coloniaux).

Le sexagénaire a quitté Kelbo dans le Soum (Nord) avec ses deux épouses et ses vingt enfants et petits-enfants, pour se réfugier dans la commune de Sibi (15Km de Boromo, Balés, Boucle du Mouhoun, Ouest).

Seydou Kelbo n’est pas le seul à avoir fui les exactions terroristes. Ils sont plus de 950 mille à l’échelle du Burkina Faso et près de 2702 à se réfugier à Sibi, à la date du 5 juin 2020.

«Nous avons échappé aux terroristes mais nous ne sommes pas à l’abri de la famine», se lamente Alimata Belem, une fillette aux bras et également mère de cinq autres enfants.

Seydou Yongo est l’un des premiers déplacés installés à Sécaco.

Après avoir erré dans le camp de déplacé de Kongoussi (Centre-nord) avec sa famille depuis des mois sans aide, un autre déplacé a dû trouver refuge avec sa famille le 20 mai 2020 sur le site de déplacé de Sibi.

Mais la majorité des déplacés, arrivés en 2019 selon le maire de Sibi Issifou Ganou, sont repartis dans deux sites dont Sibi (1087 personnes) et Sécaco (1615 personnes).

«A la demande du préfet, nous avons trouvé un site pour les installer», a indiqué le porte-parole du chef de village de Sécaco, Kalifa Ko.

Pour M. Ko, il était de leur devoir de leur accorder l’asile car ces déplacés ne sont pas là de gaité de cœur.

                                  De dures conditions de vie

Ces déplacés qui ont réussi à trouver un abri, disent avoir été recensés, mais l’aide se fait toujours attendre.

«J’ai vu mes vivres partir en fumé. Je n’ai rien pu sauver. Ils (terroristes) ne m’ont pas laissé l’occasion de prendre ni extrait de naissance ni papier d’identité car il fallait se sauver en toute vitesse », se morfond un déplacé venu de Silgadji dans le Sahel(Nord).

Madame Sawadogo, mère de cinq enfants souhaite que son premier fils et son mari ne reviennent pas bredouillent du site d’or où ils y sont depuis trois jours.

Sur le site de Sibi, on dénombre également plus d’une trentaine de femmes nourrices avec des bébés de moins d’un mois à un an.

La plupart d’elles sont arrivées en état de grossesse dont certaines presqu’à terme. D’autres sont arrivées sur les lieux avec leurs bébés.

Ces nourrices confient manquer du lait pour alimenter leurs nourrissons car elles n’ont pas de quoi manger.

«Nous sommes inquiets dès que la pluie s’annonce», a affirmé Zenabo Sawadogo.

Alimata Belem s’inquiète lorsque la pluie s’annonce.

En plus des problèmes de toits, de nourriture, il ressort que ces personnes sont confrontées à la difficulté d’accès à l’eau.

Le maire de Sibi, Issifou Ganou, tout en dépeignant la situation difficile de ces populations, a indiqué que sa commune a réalisé plusieurs forages.

Seulement avec le flux important des déplacés et des orpailleurs, ces forages sont insuffisants, précise-t-il.

Et pour couronner le tout, poursuit-il, «certains propriétaires terriens menacent de récupérer leurs terres qui constituent des sites de déplacés pour s’adonner à l’agriculture pendant l’hivernage».

Mais M. Ganou rassure qu’un terrain d’entente a été trouvé avec ces propriétaires terriens. Ils ont pour ce faire, réuni les déplacés de Sibi dans un site au lieu de deux comme au départ.

Face à l’ampleur des besoins, le maire de Siby dit avoir l’impression que sa commune est oubliée.

«J’ai l’impression que ma commune n’est pas prioritaire », a-t-il dit, tout en précisant que la mairie ne dispose pas de ligne budgétaire pour la prise en charge de cas, même les plus graves.

                                            Survivre en attendant…

  Mais en attendant une quelconque aide des autorités gouvernementales, certains déplacés ont développé des initiatives pour survivre telles que le petit commerce ou des activités d’orpaillages.

«Ce sont nos enfants et nos maris qui travaillent au niveau du site d’or pour s’occuper de nous», renchérie la déplacée de Kelbo Zenabo Sawadogo.

Dans leurs activités d’orpaillage, certains déplacés pu acquérir des lopins de terre au prix variant entre 50mille et 75mille francs FCFA, soit pour construire des maisonnettes de dix tôles, soit pour construire des huttes.

Alors que certains d’entre eux sont coincés à vingt dans une maisonnette de dix tôles, ceux qui vivent dans des huttes ont peur de l’hivernage.

Ces derniers souhaitent s’installer définitivement car selon eux, ils ne comptent plus retourner d’où ils viennent. Ils demandent également à la mairie, des terres pour cultiver.

«La mairie ne dispose pas de terre agricole. Il n’y a que les propriétaires terriens qui peuvent consentir de prêter des terres à des gens pour cultiver. La mairie ne peut qu’enregistrer ces concessions dans un registre», a claironné le maire.

Le maire de Sibi Issoufou Ganou appelle à agir en faveur des déplacés.

Le Haut-Commissaire de la province des Balé Yaya Sanou a souligné qu’après avoir fait le point de la situation des déplacés de l’ensemble de la province aux plus hautes autorités, un soutien a été obtenu.

Mais selon lui, au vue du nombre important de ces déplacés, on n’a pu toucher tout le monde.

«Nous avons donc opté de repartir avec ceux de Fara, Poura et Boromo où il y a également un nombre important de déplacés», a justifié M.Sanou

«Les déplacés de Sécaco sont des orpailleurs qui, à cause de l’insécurité, se sont retrouvés ici pour continuer leurs activités d’orpaillage.  En même temps ils font d’une pierre deux coups. Donc c’est difficile de les traiter de la même manière que les autres », a expliqué Yaya Sanou.

 

                Des velléités d’exploitation de la forêt classée de Soroboly

 Le maire parle de calculs visant à obtenir le statut de déplacé et en même temps pouvoir mener des activités d’orpaillage.

« Au moment où la situation sécuritaire se dégradait au niveau de la zone du Nord et du Sahel, nous avons accueilli des gens qui sont venus directement de ces localités pour s’installer ici et, ce, en traversant toutes les autres communes », a soutenu Issifou Ganou.

En plus d’être attiré par l’activité d’orpaillage, Yaya Sanou soupçonne des velléités de convoitise et d’exploitation de la forêt classée de Soroboly à des fins agricoles.

Le Haut-commissaire souhaite que la forêt classée de Soroboly soit préservée.

«Comme ils s’y sont installés et que personne ne les empêche, ils se disent qu’ils peuvent faire des champs dans la forêt », a poursuivi le Haut-commissaire.

«Lors de nos rencontres avec eux, certains ont eu à me signifier clairement que la forêt classée appartient à l’Etat et non à la commune », a confié Issifou Ganou, craignant ainsi la disparition de la forêt.

Pour ce faire, le Haut-Commissaire a évoqué la nécessité de la prise de mesures idoines afin de délocaliser ces déplacés vers un autre site d’accueil afin de préserver cette forêt, classée sur le plan mondial comme un site d’une importance capitale.

Agence d’information du Burkina

Rabiatou SIMPORE

rabysimpore@yahoo.fr

Crédit Photo : Aminata CISSE.

 

 

 

 

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