Burkina/Putsch 2015 : Le parquet militaire aux témoins le caractère délictuel du faux témoignage
Ouagadougou, 28 Janvier 2019 (AIB)- Le parquet militaire a rappelé lundi aux deux premiers témoins appelés à la barre du Tribunal militaire, qui sont présentés par la partie civile comme des «supporteurs de certains accusés», qu’un faux témoignage est condamnable par la loi.
Le procès du putsch de septembre 2015 est entré dans sa seconde phase lundi avec l’audition des deux premiers témoins : Bénédicte Jean Bila et Alidou Sawadogo sur une liste de 10 témoins communiquée.
Suites aux témoignages, le parquet militaire et les avocats de la partie civile ont estimé que les deux témoins refusent de répondre avec franchise à leurs questions malgré la prestation de serment qu’ils ont fait.
«Le comportement à la barre des témoins manque de sérieux car dans une affaire où ils sont cités comme témoins, ils viennent dire qu’ils ont tout oublié» a regretté Me Guy Hervé Kam.
Pour Me Séraphin Somé, les deux premiers témoins bien qu’ayant prêté serment, n’agissent pas comme des témoins mais plutôt comme des «supporteurs de certains accusés».
«Ils reviennent sur des déclarations, ils font de fausses déclarations. Cela mérite d’être sanctionné sinon d’autres témoins viendront nous mener en bateau et refuser de répondre aux questions» a-t-il affirmé.
Le parquet militaire a rappelé que pour des témoins qui ont prêté serment, un faux témoignage est passible d’arrestation selon la loi.
«Lorsque la déclaration d’un témoin est faux, le Tribunal peut sur proposition du parquet militaire, procéder à son arrestation » a-t-il affirmé.
Précédemment accusé de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat au lendemain du putsch, Alidou Sawadogo a par la suite bénéficié d’un non-lieu par la chambre de contrôle. Il est donc passé du statut d’accusé à celui de témoin.
Pour l’avocat de la défense Me Mireille Barry, la partie civile et le parquet militaire doivent poser des questions sur des faits précis et non revenir sur des questions qui avaient été posées au témoin alors qu’il était accusé.
«Je ne comprends pas que quelqu’un qui a dit des choses devant le juge d’instruction en tant que prévenu, qu’on vienne lui demander aujourd’hui de confirmer ses mêmes propos alors qu’il est témoin» a-t-elle affirmé.
Mais pour le président du Tribunal Seydou Ouédraogo, les témoins sont tenus de répondre aux questions et surtout de dire la vérité parce qu’ils ont prêté serment.
Ancien chef protocole du Général Djibril Bassolé, Alidou Sawadogo a reconnu ce lundi, avoir remis la somme d’un million de FCFA au journaliste Adama Ouédraogo dit Damiss le 17 septembre 2015 de la part du Général Bassolé.
«Ce n’était pas la première fois que je remettais une commission de Bassolé à Damiss. J’ai été surpris de voir le nom du journaliste dans la procédure judiciaire » a-t-il affirmé.
«Est-ce que vous avez appris que la somme a été utilisé pour le putsch ?» a demandé le président du Tribunal au témoin.
«Personne ne me l’a dit, je ne peux pas l’attester» a répondu ce dernier.
Alidou Sawadogo a aussi expliqué qu’après la réinstallation des autorités de la Transition au pouvoir, le Général Bassolé l’a appelé de nouveau pour le demander de remettre une somme de 5 millions de FCFA au fils du Général Diendéré, Ismaël Diendéré pour des raisons humanitaires.
Le parquet a cité un autre témoin qui aurait déclaré selon lui, que la somme a servi à autre chose.
«Concernant les 5 millions reçus par Ismaël Diendéré, je m’en tiens à ce que Bassolé m’a dit. Si un autre témoin parle d’une autre destination, cette personne peut venir vous en dire plus », a répondu le témoin.
Appelé à la barre pour faire une observation sur le témoignage de Alidou Sawadogo, le journaliste Adama Ouédraogo dit « Damiss » dit avoir le sentiment que le parquet militaire veuille que l’on dise ce qu’il veut entendre.
« J’ai mal de voir que des magistrats professionnels agissent comme des Koglweogo (controversés groupes d’auto-défense» a lâché le journaliste à la face du parquet militaire, avant de mettre au défi toute personne de prouver qu’il a utilisé le million dans le cadre du putsch.
Réagissant aux propos de l’accusé, le parquet militaire a déclaré que «personne n’a le monopole de proférer des paroles irrespectueuses ».
La suite des questions du parquet militaire et des avocats est prévue mardi 29 Janvier 2019 au Tribunal militaire de Ouagadougou.
Pour cette phase de témoignage, l’on enregistre outre les deux premiers témoins, 8 autres à venir.
Il s’agit de Noël Sourwèma, Bondaogo Amidou Nikiéma, Rachid Ilboudo, Rasmané Ouédraogo, Arouna Mandé, Charles Niodogo, Achille Marie Joseph Tapsoba et Michel Ouédraogo.
Agence d’Information du Burkina
Wurotèda Ibrahima SANOU