« Une nuit très éprouvante » : la police mise en difficulté par des émeutiers « très mobiles » en France

par Alexandre HIELARD et Tiphaine LE LIBOUX

Des émeutiers « très mobiles », organisés en petits groupes pour commettre violences et dégradations avant de disparaître : les forces de l’ordre ont vécu en France une nuit « très éprouvante ».

Des violences, avec des mairies, des écoles et des commissariats incendiés, ont à nouveau éclaté partout en France dans la nuit de mercredi à jeudi dans les quartiers populaires de tout le pays, en réaction à la mort de Nahel, 17 ans, tué mardi par un policier lors d’un contrôle routier auquel il essayait de se soustraire à Nanterre, près de Paris.

« C’était une nuit extrêmement éprouvante, violente, avec des groupes mobiles à peu près partout », rapporte à l’AFP Grégory Joron, secrétaire général du syndicat Unité SGP Police.

Ce CRS (policier anti-émeute) de formation, sur le terrain lors des émeutes survenues en 2005 après la mort de deux adolescents électrocutés dans un transformateur électrique en tentant d’échapper à la police en banlieue parisienne, estime que l’on se situe « au même niveau d’intensité ».

« Ils étaient trop nombreux, trop mobiles. On n’avait pas assez de monde. Dans ces cas-là, tu gères rien, tu subis. Il n’y a plus de stratégie à part rentrer chez soi entier, protéger ce que tu peux et attendre que ça se termine », résume-t-il.

Fait rare, au Bourget, au nord de Paris, des policiers municipaux ont dû tirer en l’air pour se dégager, a indiqué une source policière.

Et, selon une autre source policière, illustration du degré d’organisation de certains émeutiers, six individus qui vendaient des mortiers d’artifice sur la voie publique ont été interpellés mercredi soir à Gennevilliers.

– Consignes –

Selon un cadre de la préfecture de police de Paris, le niveau des violences est « monté de deux crans » par rapport à la première nuit de heurts. L’intensité observée en 2005 n’est pas encore atteinte « pour l’instant », mais « cela pourrait car rien ne semble pouvoir arrêter » les trouble

Le même haut-gradé retient qu’il n’y a « pas eu de faits graves, comme un mort ou des blessés très graves ».

Selon plusieurs sources policières interrogées par l’AFP, des consignes de tempérance avaient été passées aux effectifs engagés pour éviter un « suraccident ».

Dans une note de la direction départementale de la sécurité publique du Nord, consultée par l’AFP, il a notamment été demandé de ne pas recourir au lanceur de balles de défense (LBD), « sauf état de nécessité ».

Selon une source syndicale policière, des instructions ont aussi été données pour mettre en pause les contrôles anti-rodéos, les patrouilles dans les cités sensibles sauf en cas d’appel au 17, et les contrôles d’identité.

« De toute façon, c’est pas la police qui est venue dans les cités, c’est les cités qui sont venues chez nous, dans les commissariats », soupire Julien Schenardi, délégué Ile-de-France du syndicat Alliance.

« Le ministre a seulement passé des consignes d’apaisement », dément l’entourage de Gérald Darmanin.

– Changement de doctrine –

Mais, selon une source policière, le ministère de l’Intérieur, où était organisée une réunion interministérielle de crise convoquée par Emmanuel Macron jeudi matin, a demandé pour la nuit prochaine « un changement de doctrine », « plus offensive ».

40.000 policiers et gendarmes seront mobilisés en France jeudi soir, dont 5.000 à Paris et en proche banlieue, contre 9.000 la nuit dernière, a annoncé Gérald Darmanin, devant la mairie incendiée de Mons-en-Baroeul (Nord).

Pas de recours en revanche à l’état urgence à ce stade, comme en 2005, où les violences urbaines avaient duré trois semaines. « Je crois qu’on peut mobiliser énormément de moyens (…) sans qu’on ait besoin de recourir à des articles particuliers de la Constitution », a tranché le ministre de l’Intérieur.

Au-delà du nombre, « il va falloir revoir sans doute certains des dispositifs pour être plus mobiles », a déclaré sur France Inter la porte-parole du ministère de l’Intérieur, Camille Chaize.

Dans plusieurs villes, les forces de l’ordre ont dû être réapprovisionnées en munitions dans la nuit. Mais la direction générale de la police nationale (DGPN) a démenti à l’AFP la rumeur selon laquelle leurs réserves étaient insuffisantes.

« Les stocks (balles de défense, lacrymogène…) existent et permettent de tenir dans la durée si nécessaire », assure-t-elle.

Car l’autre enjeu, estime le cadre de la préfecture, c’est « la durée des heurts, qui s’étaient étalés sur trois semaines à l’automne 2005, avec des unités qu’il faut relever, qu’il faut faire dormir ».

Avec l’AFP

 

 

 

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