Ces asticots ont été produits en 48h

Production d’aliments pour volaille

L’asticot, cet « or nauséabond » dans nos abattoirs

L’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso, sis au secteur 11, est un pôle économique où se mènent plusieurs activités. La production des asticots est l’une de ces activités. Celle-ci permet à plusieurs personnes de subvenir à leurs besoins. Les asticots produits sont vendus aux aviculteurs pour l’alimentation de la volaille. Reportage !

 

Lundi 9 janvier 2023. Il est 8h12mn. Un épais brouillard cache encore les rayons du soleil. La fraicheur matinale se fait toujours sentir. Selon la météo, il fait 22° Celsius dans la ville de Sya. L’esplanade de l’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso, sis au secteur 11, jouxtant le marigot Houet et les rails est jonchée de tas d’immondices composés de restes d’animaux, de bouse, de fumier, de cornes, de sabots …

C’est dans ce décor nauséabond que Boureïma Kalmogo, portant une paire de gangs et muni d’un balai et d’un seau, recueille des larves qui ressemblent à de petits vers de terre. En fait, M. Kalmogo récolte en cette matinée ses asticots sur ce lieu qui lui sert de site de production. Le sexagénaire nous confie qu’il est producteur d’asticot depuis 18 ans.

A l’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso, ils sont aujourd’hui une vingtaine de personnes à faire ce « job ». « C’est en 2005 que j’ai commencé à apprendre ce travail auprès d’un monsieur qu’on appelle ‘’Super’’. L’apprentissage n’est pas difficile. En trois jours seulement, j’ai maitrisé le processus de production.

Producteur d’asticot à l’esplanade de l’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso, Boureïma Kalmogo, relève le manque de matériel de travail pour certains de ses collègues

Au début, c’était difficile car les gens ne me connaissaient pas et je n’avais donc pas aussi de clients. Par la suite, j’ai eu des clients », nous raconte M. Kalmogo. Dans sa description du processus de production, tout commence la nuit à partir de 21h et en 48h, on peut récolter ses asticots. « On se procure gratuitement de la bouse et du sang des animaux abattus à l’abattoir.

Ensuite, on étale la bouse qu’on asperge avec le sang. On peut y ajouter, de la bouse de porc et des poils. On laisse le mélange pendant 48h. Le sang et les odeurs nauséabondes attirent les mouches. Celles-ci viennent sucer le sang et y pondent leurs œufs. Ces œufs s’éclosent pour donner des asticots. En 48h, les asticots sont mûrs pour être récoltés », détaille-t-il.

 

Un aliment prisé par la volaille

Pour vendre ses asticots, Boureïma Kalmogo utilise un seau de 20 litres comme instrument de mesure. Le contenu du seau (mélange de la bouse et de l’asticot) coûte 300 F CFA. Certains de ses collègues utilisent plutôt un couvercle de boîte de conserve de tomate comme instrument de mesure de vente d’asticots purs (sans bouse) à 25 F. Après la récolte, les asticots sont vendus aux aviculteurs. Agent communal, Mamadou Millogo, fait l’élevage de la volaille à domicile.

Ce lundi 9 janvier 2023, il est venu à l’abattoir pour s’approvisionner en vers pour ses poulets. « J’achète les asticots pour donner à des poulets locaux et je les nourris avec cet aliment depuis 2011 », précise-t-il. M. Milllogo dit se procurer ces asticots trois fois par semaine et à chaque achat, il dépense 300 à 500 F CFA. « Une fois à la maison, je mets les asticots dans le son de céréales. Cela permet de réduire leurs odeurs et de les conserver pendant plusieurs jours », relève-t-il.

Selon lui, les asticots contribuent à engraisser rapidement les poulets et la volaille en général et booste leur croissance. Il ajoute que les asticots sont très prisés par la volaille (poulets, dindons, pintades, canards, oies…), à l’exception de certains oiseux comme les pigeons et tourterelles. Mais Mamadou Millogo prévient que l’excès de cet aliment peut nuire à la santé des poulets, surtout chez les poussins.

 Des difficultés à la pelle

 Pour les producteurs d’asticots de l’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso, comme Boureïma Kalmogo, de nombreuses difficultés jalonnent l’exercice du métier. Il évoque surtout l’odeur nauséabonde du site et le manque de matériel adéquat de travail. « J’utilise une brouette, une pelle, des gangs, des bottes et un cache-nez alors que certains de mes collègues n’ont pas ces matériels au complet », dit-il.

Il ajoute qu’une autre difficulté est la période de fraicheur et la saison pluvieuse qui ne sont pas favorables à la production des asticots. « Pendant la fraicheur, le vent assèche la bouse rapidement. Les mouches se déplacent peu et elles ne pondent pas beaucoup. Cela fait que nous n’avons pas beaucoup d’asticots.

A la saison pluvieuse, c’est pire. L’eau de ruissèlement emporte souvent la bouse. Il y a aussi les méventes, car à cause de la boue et des odeurs, les clients à venir acheter les asticots ». Selon M. Kalmogo, la période propice pour la production des asticots est celle de la chaleur (février à juin). Cette période, explique-t-il, correspond à celle des mangues où il y a beaucoup de mouches qui viennent pondre, et donc beaucoup d’asticots. Il termine la série des difficultés avec la mévente des asticots qui survient généralement après les fêtes de fin d’année, car la plupart des aviculteurs ont vendu leur volaille.

Malgré ces difficultés, Boureïma Kalmogo affirme que lui et les 20 autres producteurs sur le site, arrivent à joindre les deux bouts. « J’ai en moyenne un revenu journalier de 3 000 F CFA et je prends en charge une famille de huit personnes », se félicite-t-il. Pour Mahamadou Bayala, quadragénaire, agent de l’abattoir frigorifique de Bobo-Dioulasso et producteur d’asticot à ses heures libres, le métier nourrit son homme. « En plus de la vente des asticots, je vends le fumier qui provient de la bouse séchée après l’extraction des asticots.

Le fumier est vendu aux agricultures et aux jardiniers », soutient Mahamadou Bayala. Il relate qu’il vend le contenu d’un camion-ben « 6 roues » de fumier à 60 000 F et celle de « 10 roues » à 90 000 F. « L’année passée j’ai vendu une quantité de 6 bennes ‘’six-roues’’ à 360 000 F », se réjouit-il.

Amadou SIDIBE

(Stagiaire)

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

Captcha verification failed!
Le score de l'utilisateur captcha a échoué. Contactez nous s'il vous plait!