Avec des cordons pierreux constitués à mains nues, le producteur a rendu l’exploitable de la colline possible.

Entrepreneuriat agricole

Issiaka  Zoubga,  le  producteur modèle  sur   les  collines  de  Bouakuy

Issiaka  Zoubga  est  un producteur modèle à Houndé, dans la  province du Tuy. Passionné de l’entrepreneuriat agricole, sieur Zoubga a  dompté les collines du secteur n°2 de  la ville pour y installer son projet agro-sylvo-pastoral. Dans sa ferme, il a mis sur ces collines des manguiers, des  anacardiers,  des papayers, et y  pratique  l’élevage. Retour sur le parcours d’un producteur modèle  et  résilient.

C’est après quelques années passées à l’aventure, que Issiaka  Zoubga, 47 ans  et père de 12 enfants, du  retour  au bercail, décide  en  2015  de  se lancer dans l’agro-sylvo-pastoral. Pour réaliser son projet, à défaut de terres basses, l’ancien aventurier élit domicile au sommet des collines de Bouakuy au secteur n°2 de Houndé. Ces terres, à priori hostiles à la production agricole, caractérisées par des sols pierreux très durs et  difficiles à travailler lui ont fait douter de  la viabilité de son projet.

Mais convaincu  et déterminé à mener son projet  à  bien, le  natif  de   Loaga, village  de  la  commune de Poa dans le Boulkiemdé (Koudougou), s’appuie sur la force de ses bras  et  de son ingéniosité pour dompter  son environnement. Les mains nues, il ramasse les blocs de pierres qui  jonchent le terrain, pour réaliser des cordons pierreux.

Une fois les cordons pierreux constitués, il apporte par endroit de la bonne terre pour  rendre le terrain exploitable. « Au début, j’étais considéré comme un fou (…) sans trop prendre en considération tout ce qui se disait, j’ai travaillé sans relâche pour transformer la colline en marigot pour pouvoir  produire à tout moment », révèle  M. Zoubga. Une fois son terrain propice à la production, il confie avoir débuté ses activités par la  plantation des manguiers et des anacardiers.

Mais très tôt, dit-il, il est   confronté au problème  d’eau pour l’entretien de ses jeunes plants. « J’allais  puiser  de  l’eau avec 3 bidons de 20 litres sur ma moto en ville pour arroser les  plants », se remémore-t-il. Dans ces conditions, Issaka Zoubga avait besoin de quatre jours pour  arroser les plants mis en terre. « Chaque manguier a besoin de 1 à 2 litres d’eau par jour. Avec un  bidon  de 20 litres, je pouvais servir 10  à  15  pieds. Ainsi  avec les  3 bidons, je pouvais arroser 45  pieds, soit environ 200 plants par jour », conte-t-il. Aujourd’hui, Issiaka  Zoubga dispose de plus 1 000  pieds de  manguiers et d’au moins 800  pieds  d’anacardiers  dans  sa  ferme  qui  s’étend sur environ 6 hectares (ha).

Une diversité d’activités

Depuis 2023, il a entrepris la   diversification de ses activités grâce au soutien  du  Projet  de  résilience  pour la compétitivité agricole (PReCA) qui lui a   permis  de  construire  un forage. A l’arboriculture fruitière,  il a associé la maraîcher-culture (papaye, tomate,…), l’apiculture et   l’élevage. « Présentement, j’ai des poules locales et quelques petits  ruminants. Sans  eau, il  m’était difficile de pratiquer  l’élevage »,   indique Issaka Zoubga. Dans sa ferme, il emploie deux ouvriers  permanents et au besoin plusieurs personnes pour des travaux  journaliers.

Issa  Ouédraogo  est  l’un  de  ses employés. Depuis quatre ans, il travaille  dans la  ferme sur les collines où  il  vit  avec  sa  femme  et leur fillette. « Je fais du jardinage, j’aide à réaliser les cordons pierreux et je cultive à la daba. Je veille également sur les arbres pour empêcher que les animaux en divagation ne les détruisent », explique M. Ouédraogo. Issa Ouédraogo  désirait se rendre en Côte d’Ivoire pour travailler dans  les  plantations,  mais il a finalement renoncé à  ce  projet  pour travailler  dans  la  ferme  où il est rémunéré à 375 000 F CFA l’année.

Malgré les caprices    pluviométriques de la campagne agricole 2023-2024, Issaka Zoubga a  vu  sa  production de  mangues  augmenter par  rapport  aux  années  antérieures. « Au lieu d’une tonne comme les années antérieures, j’ai pu récolter cette  année (ndlr 2024) sept tonnes de mangues dont 2 tonnes en avril, 3 tonnes en mai et 2 tonnes en juin », explique-t-il.  Actuellement, en phase de  production, le  projet  agro-sylvo-pastoral  de  M. Zoubga fait  face  à plusieurs  défis au nombre desquels le  problème de la divagation des animaux. « J’ai besoin d’un grillage  pour  clôturer tout le terrain.

La  clôture  me permettra  de  contrôler les entrées et les sorties dans la ferme »  souligne-t-il.  M. Zoubga  plaide  également pour  des formations qui lui permettront de se perfectionner dans le domaine  agro-sylvo-pastoral. Il y a aussi la  non-maîtrise  du système d’irrigation. « J’ai un forage surmonté d’un polytank de 1 000 litres mais le matériel  d’irrigation du périmètre demande beaucoup de technique pour faciliter  les travaux », soutient le dompteur des collines.

L’arrosage, poursuit-il,  se fait toujours à la main. Malgré ces difficultés, Issiaka Zoubga prévoit  diversifier encore ses  activités. En plus de l’existant, il compte additionner la pisciculture et l’élevage des vaches laitières pour la  production du lait. De nombreux riverains qui, au début, étaient   sceptiques quant à l’aboutissement du « fou », ont fini par reconnaître son exploit.

L’homme aux bidons

Parmi eux, figure Moïse Sanou, un  employé d’usine qui l’avait         surnommé « l’homme aux bidons ». « Je le voyais chaque fois   trimballer  ses  bidons  pour  aller  chercher  de l’eau. C’est ainsi   après  renseignement on m’a dit qu’il a un  verger sur la colline », fait-il savoir. Mais après l’avoir jugé trop vite, Moïse Sanou a fini par découvrir  l’exploit réalisé par le producteur. « Au début, je le prenais pour un fou. J

e pensais que c’est quelqu’un qui a reçu un choc. Mais quand je suis  arrivé un jour sur le site, j’ai compris qu’il était fou même s’il faisait  un  travail  de  fou », relate M. Sanou. Mahamadi Malgoubri, un autre riverain, éleveur de son état, raconte avoir connu M. Zoubga à ses  débuts lorsqu’il allait  faire  paitre son troupeau sur la colline qui était un  endroit touffu et caillouteux. « Je le voyais planter des arbres et puis  aller enlever de l’eau avec sa moto pour les arroser » se souvient-il.

 


Le technicien d’agriculture, Salif Samandoulgou a exhorté le producteur à continuer la collaboration avec les services techniques.

Même son de cloche pour Abel Ido, un producteur voisin  de  la ferme des collines. « Issaka Zoubga a commencé ses activités devant moi. Il  creusait des trous pour planter des manguiers et transportait de l’eau  depuis la ville  pour  venir arroser les plants ».  Selon  lui, le producteur  modèle a profondément transformé ce terrain, autrefois évité par tous pour une quelconque activité agricole du fait des nombreux cailloux. Dans la mise en œuvre de son projet, Issiaka Zoubga entretient de   bonnes relations avec les techniciens agricoles.

Selon Salif Samandoulgou, technicien d’agriculture, par  ailleurs directeur des affaires domaniales et du foncier  de  la  mairie  de  Houndé,  M. Zoubga   collabore avec son service depuis 2018. « On a été vraiment très surpris de voir que quelqu’un arrive à transformer une montagne en une  zone de culture. Il  faut le dire une montagne  qui  est  pleine  de  roches, de quartz qui sont très durs à écarter de leur zone   d’extraction  mais  il  l’a  fait », se félicite M. Samadoulgou.

Pour la réussite de son projet, le directeur affaires domaniales et du foncier  de  la  mairie  de  Houndé exhorte, celui qu’il appelle  affectueusement « le chinois burkinabè » à  continuer de se faire accompagner par les services de l’agriculture, de l’élevage et de l’environnement.

Zakaria Ilboudo, chef de service des études statistiques sectorielles à la direction provinciale en charge de l’Agriculture du Tuy, reconnait Issiaka  Zoubga   comme un producteur  modèle et un battant. « Nous apprécions son travail et l’accompagnons dans ses activités. Nous avons fait un accompagnement  technique. Il y a  eu  aussi des soutiens en intrants à travers les appuis de l’Etat à  prix  subventionnés », fait savoir Zakaria Ilboudo.

Le chef de service des études statistiques sectorielles à la direction provinciale en charge de l’Agriculture du Tuy exhorte le producteur à travailler à obtenir des  produits de qualité afin de pouvoir  conquérir le marché. Pour cela, il le  conseille d’être rigoureux dans le traitement des arbres.

BEB

 

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