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Burkina/Finance inclusive : « Nous accompagnons 60% de femmes et autant de jeunes », Wango Fidèle Yaméogo, DG de l’ANPFI

Ouagdougou, 26 oct. 2025 (AIB)- L’Agence nationale de Promotion de la Finance inclusive (ANPFI) a déjà dépassé son objectif d’atteindre un taux d’inclusion financière de 75% à l’horizon 2025. Dans cet entretien réalisé par l’AIB le 16 octobre 2025 à Ouagadougou, le Directeur général de l’agence, Wango Fidèle Yaméogo explique à l’AIB la stratégie mise en œuvre pour réaliser cette performance. Il y évoque aussi les défis et les perspectives de l’inclusion financière au Burkina Faso.

Agence d’Information du Burkina (AIB) : De façon succincte, présentez-nous l’ANPFI.

Wango Fidèle Yaméogo (WFY) : Le gouvernement burkinabè, à travers ses plus hautes autorités, a bien voulu mettre en place l’Agence nationale de Promotion de la Finance Inclusive (ANPFI) qui est une structure stratégique de l’État en charge de coordonner les initiatives d’inclusion financière, de mobiliser les financements au profit des services financiers, et surtout de prendre en charge la question de protection des consommateurs. C’est pour cela que depuis janvier 2025, l’ANPFI a fédéré l’ex-Fonds National de la Finance Inclusive et l’ex-Secrétariat Technique pour la Promotion de l’Inclusion Financière et l’Observatoire de la Qualité des Services Financiers.

AIB : Quels sont les objectifs de votre agence?

WFY : Les objectifs de l’ANPFI c’est de pouvoir mettre à la disposition des populations burkinabè des services et produits financiers abordables, adaptés. L’inclusion financière, c’est de pouvoir prendre en compte toutes les populations par rapport à l’accès aux services tels que les services de banque, les services liés à l’inclusion, aux microfinances, les opérateurs de téléphonie mobile, les émetteurs de monnaie électronique. Dans la première phase de l’ANPFI, il a été question d’assigner certains objectifs au niveau du Burkina Faso et dictés par la Banque Centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO).
Cet objectif est de pouvoir atteindre un taux d’inclusion financière de 75% à l’horizon 2025. Je pense qu’à la date d’aujourd’hui, nous avons pu atteindre un taux d’inclusion financière de 79%. Maintenant, la deuxième phase de la stratégie en préparation pourrait nous indiquer des objectifs de l’ordre de 85% comme inclusion financière à atteindre.

AIB : Quelles sont les stratégies que vous avez mises en place pour atteindre votre objectif sur le terrain ?

WFY : Avant la mise en œuvre de la première stratégie, nous étions à un taux d’inclusion financière de 61%. C’est pour dire que 39% de la population était exclue de tout système financier. Jusqu’au mobile banking, beaucoup de ménages, beaucoup de populations n’avaient pas accès au système financier. C’est pour cela que le gouvernement a pensé qu’il fallait vraiment mettre en place des initiatives. Le gouvernement a mis en place un certain nombre d’entités tels que le Fonds national de la finance inclusive en son temps, qui est devenu ANPFI en fusionnant avec d’autres entités. Cela a permis d’être présent sur le terrain, de mettre des liens de crédits à la disposition de nos prestataires de services financiers partenaires, qui sont les institutions de microfinance. Nous avons pu mettre à leur disposition pratiquement près de 20 milliards en l’espace de trois ans. Cela a pu booster les objectifs recherchés par le gouvernement Burkina Faso.

AIB : Quelle est votre cible ? Autrement dit, quelle est la frange de la population que vous ciblez dans vos actions ?

WFY : Depuis un certain temps, le gouvernement a voulu que nous prenions en compte également, à travers l’initiative Lafia, les populations vulnérables qui sont les personnes déplacées internes et les personnes retournées au niveau de leur milieu d’hôte. Les femmes PDI qui ont déjà bénéficié d’une formation en métier et également un certain nombre de populations vulnérables qui sont inscrites sur le registre social unique du ministère en charge de l’Action humanitaire.

AIB : Est-ce que vous avez des mécanismes concrets pour mesurer l’impact de vos actions sur le terrain ?

WFY : Nous sommes présents sur le terrain. C’est vrai que nous sommes dans la stratégie de faire-faire, car nous mettons les ressources à la disposition des institutions de microfinance à des taux qui puissent inciter à lutter contre la pauvreté. A titre d’exemple, les ressources que nous mettons à la disposition des institutions de microfinance, nous les mettons à un taux de 3%, tout en demandant des taux de sortie de l’ordre de 8 à 10% maximum à ces institutions.
Donc déjà sur le terrain, nous avons vraiment le système de suivi permanent. Il y a le suivi des institutions de microfinance, il y a le suivi de l’agence nationale de promotion de la finance inclusive, pour s’assurer que la population arrive à bénéficier des ressources mises en place par le gouvernement Burkina Faso.

AIB : De façon globale, comment évaluez-vous l’évolution de l’inclusion financière depuis la création de l’ANPFI ?

WFY : Depuis la mise en place de l’agence, nous avons constaté que des ressources sont mises à la disposition des institutions financières. Ces ressources ont connu un taux d’utilisation très satisfaisant et un taux de recouvrement de près de 100% par nos services auprès de ces institutions de microfinance.
C’est pour dire que le message passe au niveau de la population qui arrive à cerner les préoccupations du gouvernement qui consiste à lutter contre la pauvreté. J’en veux pour preuve déjà l’initiative qui a été lancée l’année dernière. Cette année, à la date du 30 septembre 2025, nous avons pu placer plus de 24 000 bénéficiaires qui ont pu acquérir nos financements à travers cette institution de microfinance partenaire qui nous accompagne pour la mise en œuvre de l’initiative Lafia dans l’ensemble de nos régions au niveau du Burkina Faso.

AIB : Quels sont les défis auxquels l’ANPFI doit faire face pour booster l’inclusion financière au Burkina Faso ?

WFY : Il y a beaucoup de défis parce que pour atteindre les 85% du taux d’inclusion financière à l’horizon 2030, l’ANPFI doit se réinventer, être encore plus proche de la population, tenir compte des orientations des plus hautes autorités qui consistent à accompagner les personnes vulnérables, les personnes déplacées internes, les populations autres que les PDI. L’ANPFI doit se réinventer, être plus proche des populations et continuer à protéger les consommateurs de ces services financiers, continuer à mettre à la disposition des nids de crédits au profit des institutions de microfinance, continuer d’assurer la formation et l’éducation financière de la population par tous les canons. Voilà pourquoi l’ANPFI a mis en place une plateforme dédiée à l’éducation financière dite plateforme Warikala qui existe sur l’ensemble des différents réseaux et que le retour d’informations est assez satisfaisant. Donc nous continuons vraiment de jouer notre rôle parce que l’ANPFI, au-delà de la mise à disposition des ressources au profit des populations, est chargée de la promotion de l’inclusion financière, la promotion de l’éducation financière et la protection des consommateurs à travers la médiation financière et le suivi de la qualité des services financiers.

AIB : Comment l’ANPFI adapte-elle ces produits au service des réalités du monde rural ?

WFY : Les principales cibles de l’ANPFI ce sont les acteurs du monde rural et cela à travers nos partenaires qui sont déjà beaucoup plus présents dans le milieu rural. Alors on essaie de les accompagner pour la mise en œuvre des activités génératrices de revenus. Les activités génératrices, c’est surtout l’agriculture, l’élevage et même la transformation des produits forestiers ligneux et non ligneux. Donc nous sommes là, nous les accompagnons et nous nous assurons que ces populations rurales bénéficient de produits adaptés à leurs besoins.

AIB : Comment l’ANPFI prend en compte cette branche de la population dans sa stratégie d’inclusion financière?

WFY : Effectivement, pour la prise en compte de la préoccupation liée aux personnes déplacées internes, le ton a été donné au haut niveau. J’en veux pour preuve la visite de son excellence le camarade capitaine Ibrahim Traoré aux femmes de Loumbila qui a donné des orientations séance tenante, des orientations fermes. Depuis cette visite, nous avons pris à bras le corps cette préoccupation pour pouvoir à travers l’initiative Lafia accompagner avec une enveloppe de 3 milliards pour cette année les personnes déplacées internes dans leur milieu.
Donc déjà quand nous faisons le point, le seul point qui manque à notre honneur c’est surtout la région du Liptako (ex Sahel), là où nous n’avons pas pu placer des ressources mais toutes les autres régions ont été accompagnées à ce jour par l’ANPFI pour pouvoir prendre en compte les préoccupations des plus hautes autorités. Donc monsieur le ministre de l’économie et des finances, Dr Aboubakar Nakanabo suit de très près cette préoccupation liée à l’initiative Lafia. C’est pour cela qu’il a mentionné à travers notre lettre de mission le fait de pouvoir financer et accompagner 30.000 bénéficiaires au titre de cette année et l’année prochaine nous pourrons aller jusqu’à 70.000 bénéficiaires pour boucler l’objectif de 100.000 bénéficiaires pour un montant de 10 milliards recherchés par l’initiative.

AIB : Qui parle de PDI, parle forcément des personnes vulnérables, donc des femmes, est-ce que l’ANPFI dans sa stratégie, inclut-elle cette frange de la population ?

WFY : Les préoccupations sont toutes essentielles pour nous au niveau de l’ANPFI. Nous accompagnons 60% de femmes et autant de jeunes. Donc les préoccupations des femmes sont largement prises en compte à notre niveau.

AIB : De nos jours, le développement rapide de la technologie et du numérique avec l’essor des agences de téléphonie mobile ne constitue-t-il pas un obstacle à l’essor de l’inclusion financière au Burkina Faso ?

WFY : Pas du tout, c’est une complémentarité. Qui parle de promotion de l’inclusion financière, qui parle de taux d’inclusion financière, parle de taux global d’utilisation de l’ensemble des services financiers. Et l’ensemble de ces services financiers va de la banque en passant par la microfinance, les émetteurs de monnaies électroniques sans oublier la pénétration de la téléphonie mobile. Donc les moyens de paiement électroniques qui sont Orange Money, la Moov Money, Sank money, etc. permettent de booster le taux d’inclusion financière.
Il y a des gens qui n’ont pas de compte dans les instances bancaires ou dans les instances de microfinance mais qui ont des comptes Moov Money, Orange Money, Wave, Sank money et qui utilisent ces comptes pour faire des paiements, payer les scolarités de leurs enfants, payer des factures d’eau, des factures d’électricité, payer pas mal de services marchands qui passent par ces comptes-là. Donc nous trouvons un moyen pour les sensibiliser qu’au lieu de détenir seulement des comptes au niveau des téléphonies mobiles, ils peuvent aller vers les institutions financières pour également se formaliser et disposer des comptes auprès d’elles, c’est-à-dire les microfinances, les banques, la banque poste, etc.
La digitalisation est un axe stratégique dans le cadre de la promotion de l’inclusion financière au niveau de notre État. Donc la plupart des instants de microfinance qui ont eu des difficultés dans certaines zones, ont à travers cette digitalisation, permis à beaucoup de clients de retirer leur argent par le canal des téléphonies mobiles. Donc c’est une complémentarité et nous les encourageons à persévérer dans ce sens.

AIB : Quelles sont vos perspectives ou vos ambitions pour améliorer l’inclusion financière au Burkina Faso ?

WFY : Nos ambitions ont déjà été édictées déjà par les plus hautes autorités. J’en veux pour preuve l’adresse de Son Excellence le camarade capitaine Ibrahim Traoré à la Nation en fin décembre 2024, qui mettait un point d’honneur à l’inclusion financière.
Il nous exhorte à aller sur le terrain, à prendre en compte les préoccupations des populations, à les accompagner comme il se doit, parce qu’il n’y a pas de raison qu’on puisse laisser les jeunes s’adonner à des activités qui puissent compromettre même l’avenir de notre pays. Donc c’est pour cela que nous, nous sommes sur le terrain au quotidien pour continuer à accompagner ces jeunes, pour les fixer dans leurs territoires et les accompagner comme il se doit. Donc il y a beaucoup de défis qui s’offrent à l’Agence Nationale de Promotion de la Finance Inclusive et les plus hautes autorités, déjà au niveau de notre ministère, nous accompagnent pour atteindre les objectifs à ce niveau.

Agence d’Information du Burkina

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