Bobo-Dioulasso

Parcours atypique du colonel de l’art

Handicapé moteur depuis son bas âge,  Boubacar Koné àl’état civil, artiste-peintre Colonel,  a transformé son handicap à son avantage. A « Handicap production », il transmet son savoir-faire aux étudiants et élèves.

Colonel, artiste peintre handicap moteur, Boubacar Koné à l’état civil s’intéresse à l’art depuis 20 ans. Son nom d’artiste colonel le tient  depuis sa tendre enfance. « Quand j’étais petit, pendant les jeux, j’étais toujours aux commandes,  donc mes amis m’appelais colonel », explique-t-il. Une fois artiste, il a gardé ce sobriquet. Le mardi 26 janvier 2021, il est 14h30 minutes.  Assis dans son « modeste » atelier dénommé « Handicap production » à  Sikassosira au secteur 8 de Bobo-Dioulasso non loin du CHUSS, l’artiste quadragénaire a le cœur à l’ouvrage. Tableaux, porte-clés, bracelets, et colliers sont, entre autres, les chefs-d’œuvres du Colonel de l’art. D’où viennent la passion et le talent de l’artiste pour ce métier ?

Tout a commencé, selon lui,  depuis sa tendre enfance. « Depuis tout petit j’aimais dessiner, je faisais les dessins sur les cahiers de présentation avec également de petites œuvres à la maison. A l’époque mon père m’a inscrit à l’école mais j’ai abandonné l’école dès la classe de CE1. J’étais au quartier à ne rien faire», relate-t-il. Conscient que ce chemin ne mène pas à Rome, Colonel décide d’aller s’inscrire dans un centre d’apprentissage en 1996 où pendant trois ans, il apprend  la soudure, la peinture et la menuiserie et bien d’autres choses. A sa sortie du centre, il cherche à s’installer sous son propre compte.

« J’ai déposé des demandes d’aide dans des services afin d’obtenir des financements  pour ouvrir mon atelier sans un écho favorable », confie-t-il. Après une année et demie où toutes les portes lui étaient fermées, l’artiste décide de se lancer dans de petits commerces, en vendant des colas, des papiers de ciment. Pour réaliser son rêve, Colonel économise petit à petit son argent pour acheter la peinture, le bois et à faire les œuvres à domicile. « Les bobolais ont commencé à s’y intéresser et d’autres me demandaient où ils pouvaient me trouver s’ils avaient besoin de moi », raconte colonel. Petit à petit, il a construit son atelier en 2000. L’artiste peintre se décrit comme un artiste polyvalent. « Je travaille sur le bois avec le bois, les tissus, les calebasses aussi. Je fais des boucles d’oreilles, des portes clefs, tableaux et plein de choses ».

Environ 1250 œuvres déjà confectionnés

Colonel tire son inspiration partout.  « Dans mon sommeil, j’ai souvent de l’inspiration. Pendant mon sommeil, quand j’ai l’inspiration, je me lève pour tracer sur une feuille et le matin je commence à faire des œuvres là-dessus.  Il y a d’autres inspirations qui viennent lorsque je suis en promenade ou dans un endroit », fait-il comprendre. Dans son atelier et à la maison, environ 1250 œuvres sont déjà confectionnées mais le problème d’écoulement se pose avec acuité.

« Avant nous  exposions à l’institut français de Bobo-Dioulasso, où il y avait des touristes et nous arrivions à avoir notre pitance quotidienne »,se confie l’artiste peintre. Mais avec l’insécurité et l’apparition de la maladie à coronavirus, les clients se font rares, poursuit-il.  Colonel déplore le fait que les burkinabè n’accordent pas de l’importance à l’art. « L’Etat  à laisser les artisans comme nous, mais on fait de notre mieux pour s’en sortir mais il y a toujours des difficultés pour aller de l’avant », renchérit-il.

« Handicap production », une école pour les élèves et étudiants

L’atelier « Handicap production » du colonel de l’art  accueille des stagiaires du Burkina Faso et de l’extérieur. Etudiants, et européens viennent chez colonel pour un stage de perfectionnement. Pendant les vacances, l’artiste accueille des élèves du primaire. « Pour sauvegarder nos cultures, nous devons enseigner à nos enfants l’art plastique, c’est vraiment important.

 C’est important d’être à l’école et d’apprendre en même temps un métier», soutient-il, ajoutant que son ambition est de transmettre son savoir-faire. « Je suis prêt à accueillir tout le monde. Cependant, pour apprendre avec moi, il faut aimer l’art. Sans amour rien ne peut marcher », souligne-t-il. Aujourd’hui, ils sont  trois stagiaires à être à l’école de celui-là qu’il surnomme le « Prof ».

« C’est le Burkinabè qui ne donne pas de l’importance à l’art sinon nous avons formé des stagiaires qui sont à l’extérieur et qui donnent des cours de beaux-arts dans des universités », confie-t-il, l’air attristé.«  Mais si grâce à moi Colonel, quelqu’un  réussi, c’est une grande fierté pour moi », se réjouit-il. Victor Sami Valero Sabbour, hispano-marocain fait partie des élèves de Colonel. En séjour de rupture et de remobilisation éducative, il apprend  la peinture, les tableaux et bien d’autres choses comme les boucles d’oreilles, les portes clefs depuis cinq mois à « Handicap production ». Grâce à son apprentissage auprès du son maitre,  il dit avoir  appris à ouvrir son  esprit créatif.  « Avec rien je fais tout », affirme-t-il.

« Colonel, il est dur, il est très dur », ironise le jeune stagiaire. « Je l’aime beaucoup Colonel. C’est quelqu’un qui n’a pas voulu abandonné. (…).Colonel ne se décourage jamais, il invente encore et encore », témoigne le stagiaire.  Pour la stagiaire, Sanou Florence, étudiante en finance comptabilité et audit, Colonel est passionné de son art. Lorsqu’il nous rend visite, il a toujours sur lui  de quoi travailler.  « Que Dieu lui accorde une longue vie afin qu’il puisse former plus de jeunes comme nous », souhaite-t-elle à son maitre. Sur son handicap, colonel n’est pas fataliste.  « Mon handicap a été causé par la polio. Par la grâce de Dieu, de nos jours il y a la vaccination », indique-t-il.  Pour moi le handicap n’est pas une fatalité.« Si Dieu  a fait que tu n’as pas de jambes, tu as les bras et la tête pour réfléchir, tu peux apporter ta contribution dans la construction du pays »,conclu le colonel de l’art.

Boudayinga J-M THIENON

Léon Millogo

(Stagiaire)

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